Das Rheingold, Die Walküre , Siegfried , Götterdämmerung
Richard Wagner
Le mardi 22 mai nous allons à l’Odéon à Odense, salle de concert très grande, très moderne.
Pas bien grave, la salle affiche complet!
Le prélude de l’Or du Rhin démarre et déjà nous sommes sous l’envoûtement de l’orchestre du Symfoniaorkestra d’Odense.
Le rideau se lève sur une scène nue, de grands panneaux occupent le fond de scène sur lesquels se projetteront des lumières en fonction de l’action. Cela ressemble plus à une mise en espace. On nous a épargné les fatras encombrants de certaines mises en scène actuelles. L’orchestre dirigé par ALEXANDRE VEDERNIKOV sonne très clair et est conduit avec brio et ardeur.
Le plateau de chant est homogène, un bémol cependant avec JAMES JOHNSON, un Wotan peu crédible, trop âgé et à la voix très faible. Nous sommes déjà inquiets pour la suite. LIOBA BRAUN campe avec beaucoup d’expressivité et une voix aux tonalités chaudes Fricka. VSEVOLAD GRIVNOV, chanteur d’origine russe est un Loge machiavélique à souhait.
Finalement tous les dieux, seconds rôles seront tous excellents, une mention particulière pour Alberich, Mime, Fafner et Fasolt.
Mime chanté par GERHARD SIEGEL en particulier est époustouflant par son jeu et la puissance de sa voix.
La première journée de la Tétralogie dans la ville d’Odin est une réussite!
Le mercredi 23 mai c’est la Walkyrie : sous un soleil de plomb nous retrouvons l’Odéon.
Tout d’abord quelqu’un vient faire une annonce avant le lever de rideau, mais pour nous le danois est incompréhensible, donc mystère.
L’ouverture est lente, ce sera le parti pris du chef pour toute la Tétralogie de diriger un peu lentement.
Le rideau s’ouvre sur le même décor que Rheingold, toujours avec de grands panneaux en fond de scène sur lesquels sont projetées des lumières représentant des feuillages verts symbole de la forêt.
Notung est déjà plantée dans un panneau.
Au milieu de la scène une immense dalle plate servira de table au premier acte et de rocher au 3 ème acte. Nous voilà toujours dans la sobriété extrême.
KRISTIAN BENEDIKT qui interprète Siegmund aura beaucoup de faiblesses dans la voix, dommage car elle était très belle. Nous apprendrons plus tard qu’en fait l’annonce qui a été faite avant le lever de rideau nous apprenait que KRISTIAN BENEDIKT venait d’être victime d’une intoxication alimentaire mais qu’il avait tenu à affronter son rôle ce jour-là. On lui pardonne alors sa mauvaise prestation.
Au deuxième acte on retrouve LIOBA BRAUN dans Fricka, une Fricka très classe dans son petit tailleur, son jeu est parfait et sa voix qui est restée belle a toujours un beau timbre parfois, un peu assourdi. Il faut dire que l’orchestre est fort, très fort même. Malheureusement on retrouve JAMES JOHNSON, un Wotan que nous n’avions pas aimé dans Rheingold et là c’est difficile, la voix est vraiment faible, il ne chante que dans les médiums, c’est sûr, sa technique lui permet de se rattraper, mais c’est pénible pour le spectateur. Brünnhilde avec JENNIFER WILSON, petite, un peu ronde, nous parait peu guerrière mais, surprise, avec une voix au timbre clair et vaillant et avec un jeu d’acteur très impliqué : elle nous séduit totalement.
La chevauchée des Walkyries enflamme l’orchestre qui se déchaîne; visuellement sur scène le tableau des Walkyries est peut-être moins réussi.
La dernière scène avec les adieux de Wotan et l’endormissement de Brünnhilde manque un peu d’émotion, évidemment avec un Wotan aussi peu charismatique on reste sur sa faim. Brünnhilde est touchante, sa voix sonne juste, on sent son amour pour son père mais elle ne résiste pas à son sort et s’allonge elle-même sur le rocher.
Vendredi 25 mai Siegfried !
Nous sommes dans la cour des grands!
Un plateau de chant exceptionnel avec TORSTEN KERL et CATHERINE FOSTER.
Mime chanté par GERHARD SIEGEL est toujours aussi époustouflant, la voix est puissante et son jeu d’acteur exceptionnel, un très grand Mime, (la prochaine saison 2018/2019 il va chanter Mime au Covent Garden et au Met de New York, ce n’est pas un hasard).
Gerhard Siegel et Torsten Kerl
TORSTEN KERL grâce à sa voix à la coloration si particulière campe un Siegfried plein de spontanéité et avec Brünnhilde, CATHERINE FOSTER, à la fin du troisième acte on atteindra des sommets émotionnels !
CATHERINE FOSTER ne chantera dans cette Tétralogie que le dernier acte de Siegfried, mais l’éveil de Brünnhilde est un sommet et quand nous la voyons se relever tout doucement de son long sommeil, elle nous bouleverse avec « Heil dir Sonne, Heil dir Licht! »
La salle croule sous les applaudissements, on sait que l’on vient d’assister à quelque chose de rare.
Le metteur en scène est une jeune femme JASMIN SOLFAGHARI et on peut vraiment l’applaudir pour la façon dont elle a appréhendé le Ring. Elle a laissé son ego de côté et ses fantasmes que nombre de ses collègues ne savent pas éluder et nous imposent souvent en oubliant ce que voulait RICHARD WAGNER.
Dimanche 27 mai, dernière journée avec le Crépuscule des Dieux.
C’est 15 heures, le ciel est bleu et il fait toujours aussi chaud à Odense!
Les Nornes dans le même décor dénouent les fils du temps, elles sont vêtues de blanc et de gris clair, les panneaux baignent dans une lumière blanchâtre. JASMINE SOLFAGHARI a vraiment privilégié la lumière, nous passons selon les scènes du bleu au mauve, au jaune acide et au rouge. C’est vraiment très beau.
Une fois encore il nous faut applaudir la direction d’acteur essentielle et exceptionnelle dans ce décor digne d’une mise en espace, et cette direction d’acteur soutient l’intensité dramatique.
On a des tableaux saisissants qui ressemblent parfois à des tableaux de Caspar David Friedrich.
TORSTEN KERL semble encore plus à l’aise dans le Siegfried du Crépuscule que dans Siegfried, il y déploie son talent. Brünnhilde est revenue avec JENNIFER WILSON et si elle, n’a pas la voix et la prestance de CATHERINE FOSTER, sa voix aux aigus qui sortent très facilement sans crier, sans forcer, nous émeut.
Hagen campé par RUNI BRATTABERG, dur, sardonique avec une voix de basse intense, est impressionnant. Tous les seconds rôles Gudrun, Gunther sont très bons aussi.
Waltraud c’est LIOBA BRAUN, notre Fricka des deux premières journées, elle affronte Brünnhilde avec vaillance et tendresse.
L’orchestre sonne comme jamais, éclatant, vigoureux, parfois un peu trop, car il peut couvrir les chanteurs, mais grâce au chef, l’émotion dramatique est constamment présente : mention très bien aux cuivres!!!
Des applaudissements qui n’en finissent pas, et qui redoublent quand l’orchestre monte sur la scène.
Nous nous nous souviendrons longtemps de cette Tétralogie à Odense.
Annie Lasbistes, juin 2018.